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LES SYSTÈMES ALIMENTAIRES ONT BESOIN D’UNE TRANSFORMATION RADICALE
Selon le dernier rapport des Nations unies sur l’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde (SOFI 2021), le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation chronique a atteint le chiffre alarmant de 811 millions. Le rapport reconnaît que la faim augmentait déjà avant la pandémie et estime qu’environ 118 millions de personnes supplémentaires étaient confrontées à la faim en 2020 par rapport à 2019.
La crise de la Covid-19 a exacerbé les problèmes structurels profonds déjà existants au sein des systèmes alimentaires des entreprises et des chênes logistiques de plus en plus mondialisées. Une transformation radicale des systèmes alimentaires, basée sur les droits humains et sur les principes de l’agroécologie est plus urgente que jamais, afin de progresser vers la souveraineté alimentaire, la justice de genre, la justice climatique, la justice économique et sociale, la biodiversité, la santé des populations et de la planète, toutes conditions préalables à une paix durable.
SE MOBILISER CONTRE L’AGRICULTURE INDUSTRIELLE
Les systèmes alimentaires industriels et l’influence croissante des entreprises dans la prise de décision politique sur l’alimentation et la nutrition aux niveaux local, national, régional et mondial, constituent un ensemble de menaces et de préjudices pour les droits humains et les droits des travailleurs, des femmes, des paysans, des peuples autochtones, des pêcheurs, des pasteurs, des migrants, des consommateurs et des précaires urbains.
Ceux qui contribuent le plus à la sécurité alimentaire mondiale, les petits producteurs, sont les plus menacés et les plus affectés par le système agro-industriel et l’accaparement des terres, des semences, des marchés, des ressources naturelles et financières par les entreprises ainsi que par la privatisation des biens communs et des biens publics qui en découle.
La pandémie de la Covid-19 a révélé le vrai visage de notre système alimentaire. La pandémie a démontré de manière probante l’échec majeur du système alimentaire industriel qui impacte de manière permanente nos territoires et nos corps, et cause de graves dommages à notre santé, à la biodiversité et aux écosystèmes naturels. De plus, la Covid-19 a démontré au monde entier la profondeur des inégalités structurelles, de la discrimination, de l’exploitation, du racisme et du sexisme qui prévalent dans nos sociétés, exacerbant leurs conséquences sur la faim, la santé et la pauvreté.
LES SOLUTIONS EXISTENT DÉJÀ : L’AGROÉCOLOGIE ET LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE
Un changement radical dans la manière dont nous produisons et consommons les aliments est nécessaire. Il y a beaucoup à apprendre des réseaux de solidarité et de soins que les personnes – souvent les plus vulnérables et historiquement opprimées – ont mis en place pendant la pandémie.
Il n’est pas nécessaire de développer de nouvelles technologies dangereuses telles que les organismes génétiquement modifiés, ni d’utiliser des euphémismes tels que « intensification durable », « agriculture intelligente face au climat » ou « solutions positives pour la nature ». La solution existe déjà, et elle se trouve dans nos assiettes. Actuellement, 70 % de la planète se nourrit grâce aux réseaux alimentaires paysans, qui fonctionnent avec seulement 25 % des ressources.
Des millions de petits agriculteurs, de pêcheurs, de pasteurs, de travailleurs agricoles et ruraux et des communautés indigènes entières pratiquent l’agroécologie, un mode de vie et une forme de résistance à un système économique inéquitable qui fait passer les profits avant la vie. L’agriculture agroécologique s’adapte constamment aux besoins, aux coutumes, aux sols et aux climats locaux. Comme l’attestent d’innombrables experts, l’agroécologie améliore la nutrition, réduit la pauvreté, contribue à la justice entre les sexes, lutte contre le changement climatique et enrichit les terres agricoles.
L’ONU NE DEVRAIT PAS SE SOUMETTRE AUX PROGRAMMES IMPOSES PAR LES GROUPES DE PRESSION DES ENTREPRISES
Le Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires ne s’appuie pas sur l’héritage des précédents Sommets mondiaux de l’alimentation, qui ont abouti à la création de mécanismes de gouvernance alimentaire mondiale innovants, inclusifs et participatifs, ancrés dans les droits humains, tels que le Comité des Nations unies sur la sécurité alimentaire mondiale (CSA) réformé. Le Sommet FSS s’appuie sur une approche multipartite forte, qui place sur un pied d’égalité les gouvernements, les entreprises, les autres acteurs du secteur privé, les organisations philanthropiques, les scientifiques ainsi que les ONG.
Bien que les organisateurs du FSS cherchent à créer une illusion d’inclusivité, il n’est toujours pas précisé qui contrôle la prise de décision et selon quelles procédures les décisions sont prises.
Malgré la reconnaissance croissante de l’échec des systèmes alimentaires industriels sur de nombreux fronts, l’agrobusiness et les entreprises alimentaires tentent de garder le contrôle. D’un côté, ils cooptent notre langage. Le Forum économique mondial appelle à une « transformation des systèmes alimentaires », et le Sommet FSS s’autoproclame « Sommet des Peuples ». Et de l’autre ils déploient la numérisation, l’intelligence artificielle et d’autres technologies de l’information et de la communication dans le but de promouvoir une nouvelle vague d’accaparement des ressources, d’extraction des richesses et d’exploitation de la main-d’œuvre ainsi que de restructuration des systèmes alimentaires en vue d’une plus grande concentration du pouvoir et de chaînes de valeur encore plus mondialisées.Le prochain Sommet sur les systèmes alimentaires illustre la manière dont les plateformes dirigées par les entreprises, en étroite collaboration avec des gouvernements qui partagent les mêmes idées ainsi que des Hauts fonctionnaires de l’ONU, se sont mis d’accord pour utiliser les Nations Unies dans le but de soutenir et légitimer une transformation des systèmes alimentaires qui sera au seul bénéfice des entreprises, tout en promouvant en même temps de nouvelles formes de gouvernance multipartite afin de consolider davantage l’influence du secteur commercial sur les institutions publiques au niveau national et de l’ONU.
NON AUX SYSTÈMES ALIMENTAIRES DES ENTREPRISES !
Le pouvoir que les entreprises agroalimentaires exercent actuellement sur les gouvernements et les Nations unies doit être démantelé afin que le bien commun soit privilégié par rapport aux intérêts des entreprises. Il est temps de connecter nos luttes et de combattre ensemble pour un monde meilleur qui serait basé sur le respect mutuel, la justice sociale, l’équité, la solidarité et l’harmonie avec notre Terre Mère.
Rejoignez la contre-mobilisation des peuples pour transformer les systèmes alimentaires agro-industriels imposés par les entreprises. Consultez le programme en ligne et hors ligne de notre événement de quatre jours qui sera bientôt publié sur ce site !
7 raisons de ne pas participer au Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires 2021
1. Le Sommet n’est pas fondé sur les droits humains et des peuples : bien que l’événement officiel promeuve une structure apparemment inclusive, il est apparu dès le début que le processus d’organisation du Sommet est opaque et a écarté d’emblée les institutions de l’ONU existantes fondées sur les droits humains ainsi que les plateformes légitimes des organisations de la société civile et des peuples autochtones. Il a également largement ignoré la crise de la COVID-19 et les violations multiples et systémiques des droits humains qui ont été encore exacerbées par la pandémie.
2. Le Sommet est dominé par les intérêts des entreprises : les groupes de pression des entreprises et les plateformes dirigées par les entreprises telles que le Forum économique mondial (WEF), l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA), l’International Agri-Food Network (IAFN), le World Business Council for Sustainable Development (WCBSD), l’Alliance mondiale pour l’amélioration de la nutrition (GAIN), le Forum EAT, le réseau Scaling-Up Nutrition (SUN) Business Network, ainsi que les principales philanthropies d’entreprise telles que la Fondation Rockefeller, la Fondation Gates et la Fondation Stordalen ont joué un rôle important dans les processus préparatoires du Sommet. La présidente de l’AGRA, Agnes Kalibata, a été nommée envoyée spéciale des Nations unies pour le sommet.
3. Le Sommet promeut des modèles de gouvernance très problématiques basés sur le multipartenariat. La forte menace qu’une approche délibérément multipartite fait peser sur le système des Nations unies ne doit pas être sous-estimée. Le multipartenariat traite tous les acteurs de la même manière, sans tenir compte de leurs différents rôles et responsabilités, des énormes asymétries de pouvoir et de ressources, et des conflits d’intérêts évidents. La tentative de remplacer les modèles de gouvernance du multilatéralisme inclusif, tel qu’il a été établi au sein du Comité des Nations unies sur la sécurité alimentaire mondiale (CSA), par un modèle multipartite avec une responsabilité supposée égale de tous, affaiblit tout d’abord le rôle des États membres eux-mêmes ; il facilite ensuite une influence indue des intérêts des entreprises, une tendance d’accaparement par le secteur commercial des processus et décisions au sein des Nations unies; et enfin il rend impossible une définition claire de systèmes de responsabilité efficaces.
4. Le Sommet promeut une conception très étroite de la science et attaque frontalement l’actuel Groupe d’experts de haut niveau (HLPE) du CSA. Le groupe scientifique du Sommet propose une nouvelle interface science-politique qui affaiblirait et mettrait à l’écart l’actuel HLPE. Le groupe d’experts de haut niveau a pour mandat clair de servir d’interface science-politique en matière d’alimentation au niveau mondial et travaille dans le cadre d’un processus participatif science/politique, incluant des consultations ouvertes qui permettent la contribution de la société civile, des communautés autochtones et de tous les acteurs concernés. A l’opposé, l’initiative du Sommet pour une nouvelle interface science-politique, propose une focalisation unidimensionnelle sur la science moderne, ignorant de nombreuses autres connaissances (par exemple, indigènes, expérimentales, paysannes, tacites, féminines). Une telle approche exclusive de la connaissance et de la science tend à favoriser les puissants, en particulier le secteur des entreprises, et à négliger les énormes problèmes posés par les conflits d’intérêts pour la recherche et la science.
5. Le Sommet oriente la transformation des systèmes alimentaires dans la mauvaise direction : il ne fait rien pour ouvrir la voie au changement urgent et profond nécessaire dans les systèmes alimentaires. L’événement de l’ONU ayant été détourné par des représentants de l’industrie alimentaire et de l’agrobusiness, il est probable que le discours du Sommet en faveur des systèmes alimentaires industriels privilégie des tendances qui favorisent les aliments ultra-transformés, la déforestation, l’élevage industriel, l’utilisation intensive de pesticides et les monocultures de produits de base. Ces tendances qui entraînent la détérioration des sols, la contamination des cours d’eau et des impacts irréversibles sur la biodiversité et la santé des personnes., continueront à se développer et à faire des ravages.
6. Le Sommet FSS promeut les plateformes multipartites en remplacement des institutions publiques aux niveaux national, régional et mondial : en ce sens, le big data et les preuves scientifiques sont de plus en plus utilisés pour remplacer la participation directe et la connaissance subjective des personnes dans les délibérations démocratiques au sein des espaces d’élaboration des politiques. Dans le même temps, les plateformes multipartites ont tendance à être orientées vers des « solutions » à des problèmes choisis et sont donc caractérisées par un mélange de pragmatisme et d’urgence, ce qui ne permet pas de découvrir les causes profondes et les asymétries de pouvoir injustes et historiques.
7. Le Sommet n’apporte pas de solutions pour combattre la malnutrition, la faim ou la crise climatique et ignore ce qui est le plus nécessaire et le plus urgent : une profonde transformation agro-écologique et basée sur les droits humains des systèmes alimentaires afin de parvenir à la souveraineté alimentaire, la justice de genre, la justice climatique, la justice économique et sociale, la biodiversité, la santé des personnes et de la planète qui sont toutes des conditions préalables à une paix durable.