« L’année prochaine, ce petit verger sera absorbé par une grande Compagnie, car le fermier, étranglé par ses dettes, aura dû abandonner. Ce vignoble appartiendra à la banque. Seuls les grands propriétaires peuvent survivre, car ils possèdent en même temps les fabriques de conserves… Les hommes qui ont donné de nouveaux fruits au monde sont incapables de créer un système grâce auquel ces fruits pourront être mangés […]. Dans l’âme des gens, les raisins de la colère se gonflent et mûrissent, annonçant les vendanges prochaines ».
Voilà ce qu’écrivait John Steinbeck lorsqu’est devenue visible, pour la première fois peut-être, la dévastation colossale provoquée par l’agro-industrie capitaliste, l’expulsion qui s’est ensuivie de familles paysannes du Midwest américain et leur arrivée en Californie dans les années 30[1]. S’il écrivait aujourd’hui, Steinbeck remplacerait peut-être les raisins par des avocats. En effet, le modèle de production de ces derniers implique une recrudescence inédite de l’agro-industrie, une recrudescence principalement fondée sur la déforestation et la surexploitation de l’eau, sur l’éradication des modes d’agriculture et l’expulsion de communautés entières.
Après la banane et l’ananas, l’avocat est le fruit le plus commercialisé au monde : sa culture se développe en termes de production et d’hectares accaparés, et continue de s’étendre à de plus en plus de pays. Mais qu’implique donc l’expansion mondiale de ce fruit ? Qu’est-ce qui motive ce négoce et qui ? Comment fonctionne, au niveau mondial et locale, ce modèle qui parvient à maintenir ses prix à la hausse ? Comment a-t-il atteint le succès dont il jouit actuellement, qui le rend présent dans toutes sortes de célébrations et d’évènements sportifs ? Quelles sont les répercussions sociales du commerce opaque auquel il est lié ?
Notre récit commence le 12 février 2023, avec la culmination de la 57ème édition du Super Bowl, le plus gros évènement sportif de l’année pour le football « américain ». Un mois auparavant, à plus de deux mille kilomètres de Kansas City – le siège du championnat – se préparait dans les usines d’emballage du Michoacán, au Mexique, l’envoi de dizaines de milliers de tonnes d’avocats. Les États-Unis absorbent 40 % des importations mondiales de ce fruit et le Super Bowl en est le moment culminant. « Avec le guacamole consommé rien qu’au moment du Super Bowl, on peut remplir 30 millions de casques de football américain », affirme Armando López, directeur général de l’Asociación de Productores, Empacadores y Exportadores de Aguacate de México (Association des producteurs, conditionneurs et exportateurs d’avocats du Mexique, ou APEAM), qui a payé près de 7 millions de dollars pour diffuser une annonce publicitaire durant le match[2].
Malgré le peu d’écho obtenu dans les médias étatsuniens, le côté obscur de la production d’avocats a été l’invité embarrassant du championnat 2023. Une plainte contre le gouvernement mexicain a été déposée auprès de la Commission de coopération environnementale de l’ACEUM (Accord Canada-États-Unis-Mexique) pour écocide et impacts environnementaux liés à la production dans le Michoacán[3].
Vue depuis le laboratoire du négoce d’avocats qu’est le Mexique, cette histoire est celle d’un fruit préhistorique vieux de plusieurs millions d’années – recensées – et transformé aujourd’hui par ces dynamiques en marchandise inopportune. Son actualité respire la violence et la fureur d’un consumérisme impulsé par les médias.
Une usine mondiale en plein « boom »
L’avocat est le fruit tropical qui a connu la croissance la plus rapide au cours des dix dernières années[4]. Le Mexique, premier exportateur mondial, assure 40 % de la totalité de ces exportations. Selon les perspectives de l’OCDE et de la FAO, cette proportion pourrait atteindre les 63 % en 2030. Les États-Unis absorbent aujourd’hui 80 % des exportations mexicaines d’avocats. Mais la production s’intensifie dans un nombre croissant de pays.
En 2021, la production mondiale s’élevait à 8,8 millions de tonnes, dont un tiers a été exporté pour une valeur de 7,4 milliards de dollars. Pour 2030, on prévoit une production de 12 millions de tonnes. Si on considère l’ensemble des 10 premiers producteurs mondiaux, on constate que la surface cultivée a doublé au cours des 10 dernières années (voir Graphique 1). Mais elle a quadruplé en Colombie, en Haïti, au Maroc et en République dominicaine, et quintuplé au Zimbabwe. Au Malawi et au Vietnam, la production a commencé depuis peu, très rapidement. Ces deux pays font désormais partie des vingt premiers producteurs mondiaux.
Dix pays concentrent près de 80 % de la production. Pour certains d’entre eux, il s’agit d’une culture dédiée en grande partie à l’export, comme l’illustrent les cas du Mexique, du Pérou, du Chili et du Kenya (voir Tableau 1). Leurs principaux marchés se situent aux États-Unis et en Europe, qui rassemblent près de 70 % des importations internationales. Alors que le Mexique fournit toute l’année son voisin du nord, les avocats consommés en Europe proviennent du Pérou, d’Afrique du Sud et du Kenya en été et du Chili, du Mexique, d’Israël et de l’État espagnol en hiver[5]. Le principal port d’entrée européen se situe aux Pays-Bas, qui sont ainsi devenus le troisième exportateur mondial d’avocats.
D’autres marchés se créent rapidement en Asie. Le Kenya, l’Éthiopie et plus récemment la Tanzanie, sont devenus de nouvelles plateformes d’exportation vers l’Inde et la Chine[6]. Les importations chinoises augmentent au départ du Pérou, du Mexique et du Chili. En 2021, ces importations ont dépassé les 41 000 tonnes, malgré la pandémie de Covid[7]. Par ailleurs, pour réduire les coûts, des entreprises avocatières étasuniennes se sont lancées dans la production locale en Chine, en particulier dans la province du Yunnan[8].
- Les avocats haïtiens ne sont pas officiellement exportés. Ils sont mélangés à ceux produits en République dominicaine puis exportés, principalement aux États-Unis[9].
Élaboré à partir de FAOSTAT et la base de données Comtrade des Nations Unies [Consulté le 3 mars 2023]
L’industrie multimillionnaire de « l’or vert »
Selon certaines estimations, le marché mondial de l’avocat s’élevait en 2021 à 14 milliards de dollars et pourrait bien atteindre les 30 milliards d’ici 2030[10]. Les principaux bénéficiaires de ce commerce sont une poignée d’entreprises qui ont opté pour l’intégration verticale. Elles étendent leur activité à un nombre croissant de pays producteurs, dans lesquels elles implantent des filiales. Elles ont également renforcé leur contrôle sur les entreprises importatrices dans les principaux pôles de consommation mondiaux.
C’est le cas des sociétés californiennes Mission Produce et Calavo Growers. La première a déclaré des ventes équivalentes à 3 % de la production mondiale en 2021[11]. Son chiffre d’affaires a régulièrement augmenté au cours des dix dernières années, pour atteindre 1,45 milliards de dollars en 2022[12]. Les États-Unis représentent 80 % de son marché, mais elle distribue également en Europe, au Japon et en Chine. Elle exporte depuis le Pérou, le Mexique, le Chili, la Colombie, le Guatemala, la République dominicaine, l’Afrique du Sud, le Kenya, le Maroc et Israël. Elle contrôle 8 600 hectares au Pérou, au Guatemala et en Colombie[13].
En 2022, le chiffre d’affaires de Calavo Growers s’élevait à 1,19 milliards de dollars[14]. Plus de la moitié de ses ventes proviennent du conditionnement et de la distribution d’avocats en provenance du Mexique, des États-Unis, du Pérou et de la Colombie[15]. Son principal marché est de loin les États-Unis, mais depuis 2021 elle cherche à accroître les exportations mexicaines vers l’Europe et l’Asie[16].
L’entreprise sud-africaine Westfalia Fruits est une autre société importante dans le secteur. Elle possède 1 200 hectares en Afrique du Sud, et se développe dans d’autres pays d’Afrique et d’Amérique latine. Elle contrôle 1 400 hectares au Mozambique, et a racheté de gros exportateurs tels que Aztecavo (Mexique), Camet (Pérou) ou encore Agricom (Chili)[17]. Ses principaux marchés sont l’Europe, les États-Unis, l’Amérique du Sud et l’Asie[18]. Dans le même temps, elle conserve des entreprises enregistrées comme « étasuniennes » dans le paradis fiscal qu’est le Delaware et a acquis des sociétés d’importation au Royaume-Uni et en Allemagne[19].
Pour se développer, ces entreprises ont eu recours à des acteurs financiers de poids. Mission Produce et Calavo Growers sont cotées à la Bourse de New York et attirent des investissements d’acteurs financiers tels que BlackRock et Vanguard Group[20]. En outre, les fonds d’investissement privés, les fonds de dotation y les fonds de pension misent de plus en plus sur l’avocat. Mission Produce s’est associé au fonds de capital-investissement Criterion Africa Partners pour lancer la production de plus de 1 000 hectares d’avocats à Selokwe, en Afrique du Sud[21].
En 2020, Westfalia a vendu des actions à l’entreprise Harvard Management Company, qui gère le fonds de dotation de l’Université de Harvard[22]. Il y a aussi le fonds de pension des enseignant·es de l’Ontario, qui a acheté en 2017 la deuxième plus grande entreprise d’avocats d’Australie, Jasper Farms. O PSP Investments, qui gère les retraites de la fonction publique canadienne, s’est quant à elle lancée dans l’achat controversé de 16 500 hectares à Hawaï pour y cultiver des avocats, entre autres. Elle fait face à de graves accusations quant aux effets de la privatisation de l’eau[23].
Enfin, il est important de souligner le fait que ces entreprises ont bénéficié de financements publics pour se développer. Ainsi, sous couvert d’aide au développement, l’entreprise publique sud-africaine Industrial Development Corporation (IDC) et la Société Financière Internationale (SFI) du Groupe de la Banque mondiale, ont soutenu l’implantation de Westfalia en Afrique et en Amérique latine[24].
Un fruit préhistorique contraint de devenir une marchandise inopportune
La plante, originaire du Mexique, était appelée « ahuacatl » ce qui, en nahuatl – l’une des langues de ses peuples autochtones – signifie testicule, en raison de la forme du fruit. Ce nom a revêtu l’avocat d’une aura magique. Les fruits étaient plantés sur des terres sacrées (des sépultures d’ancêtres) et dans leur histoire ancienne, ils étaient considérés comme des personnes qui prenaient vie sous forme d’arbres. Ce fruit (Persea americana), avec ses innombrables variétés, a accompagné les communautés mésoaméricaines depuis que la téosinte (l’ancêtre du maïs) puis le maïs, ont commencé à tisser des amitiés, tout en mutualités, avec les communautés, il y a de cela neuf ou dix-mille ans, dans les grottes de Coxcatlán, dans la vallée de Tehuacán au Mexique. On y a trouvé des traces d’avocat sous forme de variantes de domestication partielle[25]. Aujourd’hui connu dans de nombreuses régions sous le nom « avocado » (« avocat » en français), il est probable que le terme provienne d’une mauvaise prononciation du mot aguacate. L’« avocat » cherche toujours à supplanter l’« aguacate » originel, tout comme l’hybride accidentellement développé par Rudolph Hass en 1932, qui s’est imposé comme la variété la plus vendue au monde parce qu’elle est plus résistante aux intempéries, aux mauvaises manipulations, au transport et au stockage[26].
Au cours de ses premières années d’existence en tant qu’hybride commercial, il était méprisé. On raconte que ses premières variétés commerciales « Hass » étaient appelées « poires lézard », en raison de leur peau rugueuse, et que la California Merchants Association (Association des commerçant·es de Californie) a changé son nom de « aguacate » en « avocado » pour le rendre « moins mexicain », par crainte de ne pas réussir à le vendre[27]. Entre ce premier regard sur l’avocat ancestral et la dévastation véloce qu’entraîne sa production actuelle, nous assistons à une chute brutale vers la destruction qu’a subie l’agriculture, aujourd’hui plus industrie « qu’agro », et plongée dans la dévastation et la dépossession violentes qui la caractérisent actuellement[28].
Un laboratoire de profit et de dévastation
Pour évaluer les risques pour les nouveaux territoires qui intègrent le modèle industriel de l’avocat, il est important de lire le Mexique comme un espace d’expérimentation. Ce pays est devenu le premier producteur mondial au cours d’un processus étroitement lié à la dynamique de l’agro-industrie en Californie, où la culture de l’avocat a commencé au XXème siècle. Elle s’est rapidement développée, protégée des importations mexicaines par l’interdiction de 1914, qui alléguait la présence de nuisibles.
C’est ainsi que sont nées Calavo Growers (1924) et Henry Avocado (1925). La Californie a commencé à exporter vers l’Europe et a progressivement augmenté la superficie plantée jusqu’à atteindre un maximum de 30 000 hectares au milieu des années 1980, lorsque la rivalité avec le Chili a débuté[29]. Plusieurs entrepreneurs californiens ont alors fondé West Pak et Mission Produce. Cette dernière s’est très vite lancée dans l’importation d’avocats chiliens. En 1997, 60 % des achats étasuniens d’avocats provenaient de ce pays sud-américain, mais ils se sont effondrés suite à la signature de l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain)[30]. Sous la pression de l’APEAM (Association de producteurs, conditionneurs et exportateurs d’avocats du Mexique) et des entreprises étasuniennes, l’interdiction des imports mexicains a été levée. Avec l’ouverture provoquée par l’ALENA, entre 2000 et 2021, le total des exportations mexicaines d’avocats a été multiplié par plus de 13 et sa valeur commerciale par 40.
Les entreprises californiennes ont créé des filiales au Mexique et ont commencé à s’approvisionner directement auprès des producteurs, allant jusqu’à installer leurs propres usines de conditionnement dans le Michoacán[31]. Une étude estime qu’en 2005, Mission Produce, Calavo Growers, West Pak, Del Monte, Fresh Directions, et Chiquita concentraient 80 % des importations étasuniennes d’avocats du Mexique[32].
Actuellement, l’état fédéral du Michoacán représente 75 % de la production nationale, suivi du Jalisco avec 10 % et de l’Edomex, avec 5%[33]. En 2019, on pouvait déjà voir comment l’agrobusiness d’exportation était l’acteur central du champ autour duquel se sont articulées les politiques publiques. S’ils ont réussi à rentabiliser cette entreprise, c’est en obéissant aux stratégies de domination de l’agro-industrie de l’avocat et à ses impacts sur le territoire, en particulier sur les modes de vie paysans et communautaires[34]. Le boom de l’avocat au Mexique dépend aujourd’hui de l’abattage de forêts entières et a souvent recours à des incendies ou à des coupes sauvages pour faire de la place à d’autres vergers d’avocats, engloutissant les ressources en eau de localités et de régions entières. Les coûts sociaux aussi sont extrêmement élevés.
Le pays a ainsi produit en 2021 près de 2,5 millions de tonnes d’avocat, en déforestant directement ou indirectement près de 100 000 hectares en seulement 10 ans[35]. Rien que dans le Michoacán, entre 2000 et 2020, la superficie destinée aux plantations d’avocats est passée de 78 530,25 à 169 939,45 hectares[36]. Les dégâts causés par la destruction de la forêt ne peuvent être compensés par des pratiques de reforestation, car le système de relations écologiques de la biodiversité implique des processus lents qui nécessiteraient de longues périodes pour parvenir à une restauration complète après la déforestation, l’application de produits agrochimiques et la dévastation de l’eau.
Au Jalisco, la superficie consacrée à la culture d’avocats, d’agaves et de baies a triplé au cours de la dernière décennie, ce qui concurrence non seulement les paysan·nes et les forêts entretenues par les communautés autochtones, mais aussi les élevages de bétail[37]. « Rien que l’année dernière », a déclaré Adalberto Velasco Antillón, président de l’Unión Ganadera de Jalisco (Union des éleveurs et éleveuses de Jalisco), « 10 000 éleveurs ou éleveuses ont disparu », entre les personnes qui produisent du lait et celles qui élèvent des bovins pour la viande[38].
Selon la Dre Ruth Ornelas, chercheuse sur le phénomène de l’avocat au Mexique, le négoce s’est aujourd’hui développé, même s’il n’est plus efficace en raison de ses coûts beaucoup plus élevés. « Cela se traduit dans les prix. L’extorsion lors de la plantation représente 1,4 % du total produit […] De 4 à 6 pesos par kilo d’avocats ». Ce système représente une sorte de « taxe » qui n’est pas perçue par le gouvernement mais par les groupes qui contrôlent ce négoce[39]. Selon Francisco Mayorga, ex-secrétaire à l’Agriculture sous les présidents Vicente Fox et Felipe Calderón, « ils ne font pas seulement payer le propriétaire du verger, mais aussi les structures de conditionnement des fruits, celles qui abattent les arbres, celles qui les enlèvent et celles qui construisent les routes. Ils décident qui envoie, en fonction des paiements, les cargaisons à Manzanillo, à Lázaro Cárdenas, dans le Michoacán et à Jalisco, car ils ont le monopole de ce qui peut être envoyé au plus grand acheteur du monde, les États-Unis »[40].
La perception de cette taxe permet de contrôler le processus étape par étape, à tous les stades de la chaîne : verger, stockage, conditionnement, transport, réfrigération et différents modes de distribution. D’une part ils prélèvent à chaque étape une redevance, et d’autre part ils maintiennent des prix élevés en synchronisant les rythmes de stockage, de transport, de distribution, d’achat et de vente.
La Dre Ornela poursuit : « Au début, ils convainquent en recourant à la carotte ou au bâton, par un peu d’argent ou par du plomb. Le crime organisé joue le rôle de force de police en ce qu’il remplit une certaine fonction de protection qu’il vend et exerce. Il est l’autorité de régulation. Il est le fisc, la douane, et la temporalité ou la synchronisation du contrôle. Il est triste que les cartels deviennent des sources d’emploi qui embauchent des « halcones » (« faucons ») [espions dans les taxis ou cireurs de chaussures], des chimistes et des tueurs à gage. Ils ont peut-être à leur service des économistes qui les conseillent pour fixer les règles ». Mayorga précise quant à lui : « Lorsque ces groupes sont si étroitement liés aux structures étatiques, il y a une symbiose entre la production, le crime, le commerce et la fourniture d’intrants. Si cet ordre est perturbé, on peut même perdre le statut sanitaire, le contrôle des vergers certifiés pour l’exportation ». Mayorga insiste sur le fait que, comme le crime organisé administre le marché et impose « un certain ordre » en gérant le processus aux niveaux national et international, « le flux de fruits sur le marché est régulé pour que les prix ne chutent pas de manière drastique à cause d’une offre excédentaire ». Ce système investissement/extorsion permet le blanchiment d’argent, puisqu’il est très difficile de savoir qui investit, comment est généré le produit et vers où il est acheminé. Malgré cela, l’État continue de promouvoir l’avocat et de l’encenser comme une réussite de l’agroalimentaire.
Selon des données officielles, le Michoacán compte 27 712 vergers de moins de 10 hectares qui impliquent 310 000 personnes et 78 000 travailleuses et travailleurs saisonniers[41]. Il s’agit de petites exploitations prisonnières de la logique capitaliste de l’avocat qui pousse à la déforestation et à la surexploitation de l’eau décrites plus haut, mais qui instaure surtout la violence permanente comme monnaie d’échange. Cette dernière est activée en l’absence de politiques publiques et de contrôles gouvernementaux, avec la corruption et la présence de groupes criminels qui synchronisent en effet certaines étapes des chaînes d’approvisionnement et de valeur mondiales. Mais on ne peut affirmer que ce sont purement et simplement ces groupes qui dirigent l’agrobusiness de l’avocat. Ils sont plutôt absorbés par l’intégration verticale qui instaure des relations de violence multidimensionnelle. Dans cette spirale, les investisseurs et les grandes sociétés de négoce, avec l’aide des fonds de dotation et de pension, et des fonds de capital-investissement, maintiennent l’expansion de l’avocat dans le monde entier[42].
Il n’y a pas que l’avocat, il y a aussi les serres
L’accaparement de terres pour les vergers d’avocats ouvre également la porte à l’essor des serres. Un contrôle territorial absolu est recherché, dans le cadre de relations de travail profondément précaires.
L’eau et le plastique constituent ici des fils conducteurs. Ainsi, des entreprises israéliennes telles que Netafim ou Rivulis, qui fournissent des systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte à base de tubes en plastique pour l’industrie de l’avocat, tirent profit de la technification des serres de baies et autres denrées alimentaires[43]. Ce n’est peut-être pas une coïncidence si Netafim a été rachetée par le puissant groupe mexicain Orbia, leader régional de l’industrie du plastique. Ces technologies sont présentées comme un moyen plus durable, grâce à une consommation d’eau réduite[44]. Ce qui est discutable si l’on considère la quantité de plastique nécessaire et l’empreinte écologique et sociale de la numérisation associée à ce modèle[45].
La fuite en avant. Diversifier les pistes
L’exemple du Mexique nous alerte sur l’une des principales problématiques liées à la culture de l’avocat : l’eau. Au Mexique, la consommation par hectare atteint les 100 000 litres par mois, à laquelle il faut ajouter la destruction des forêts biodiversifiées, fondamentales pour le cycle de l’eau dans son ensemble[46]. L’utilisation sans discernement d’agrotoxiques qui finissent par contaminer les aquifères mériterait une étude à part. Rien que dans le Michoacán, 450 000 litres d’insecticides, 900 000 tonnes de fongicides et 30 000 tonnes d’engrais sont appliqués chaque année sur les avocatiers[47].
Au niveau mondial, la consommation d’eau de cette culture atteint des sommets. On estime que la production d’avocats consommés au Royaume-Uni et cultivés au Pérou, en Afrique du Sud, au Chili, en Israël et dans l’État espagnol, requiert 25 millions de mètres cubes d’eau par an, soit l’équivalent de 10 000 piscines olympiques[48].
Aujourd’hui, la Californie continue de produire 90 % des avocats aux États-Unis sur 20 000 hectares, mais on estime que cette culture ne durera que jusqu’en 2050[49]. La production industrielle d’avocats et d’autres fruits a mené cet état fédéral à une situation de crise hydrique extrême, à laquelle s’ajoutent les effets de la crise climatique[50].
Dans la province chilienne de Petorca, qui exporte près de 60 % des avocats chiliens, la production d’un seul kilo d’avocats nécessite 1 280 litres d’eau. La privatisation de l’eau décidée par la dictature de Pinochet en 1981, qui a coïncidé avec l’essor des exportations chiliennes, a favorisé le développement de grandes plantations qui ont progressivement asséché les fleuves et expulsé l’agriculture paysanne[51]. C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles le Chili n’assure même plus sa propre consommation. « Au Chili, nous importons actuellement plus que ce que nous exportons », déclarait il y a deux ans le PDG de Mission Produce, Steve Barnard, indiquant l’importation d’avocats du Pérou, mais aussi de Californie[52].
Alors qu’elle continue d’épuiser les ressources hydriques exsangues du Mexique, de la Californie et du Chili, l’industrie se déplace vers d’autres zones de sacrifice[53]. Pour irriguer l’aride vallée péruvienne d’Olmos où les sociétés avocatières californiennes possèdent des terres, le gouvernement péruvien a développé l’un des mégaprojets les plus conflictuels et corrompus du pays : en 2014, un tunnel transandin de 20 kilomètres de long a été construit pour acheminer l’eau du barrage de la rivière Huancabamba jusqu’à Olmos. Le projet a été vendu comme une « opportunité d’acquérir des terres agricoles avec un accès à l’eau au Pérou »[54].
C’est ensuite en Colombie que s’est arrêté le train de la production avocatière : les cultures se sont étendues à Antioquia et sur l’Eje Cafetero, et les investissements de grandes sociétés minières se sont ajoutés à l’agro-industrie[55]. « Le Pérou est destiné à remplacer une grande partie de ses avocats par des agrumes, moins gourmands en eau », alors que « l’eau devient un facteur d’investissement absolument formidable, car pour la Colombie, elle ne coûte rien », déclarait en 2020 Pedro Aguilar, directeur de Westfalia Fruit Colombia[56].
Les graines de la résistance
Si le Mexique s’est révélé un laboratoire de la dévastation, il est aussi un laboratoire de résistance, comme l’illustre la saga édifiante de la communauté purépecha de Cherán, dans le Michoacán. En 2012, une audience préliminaire du Tribunal permanent des peuples s’y est déroulée. Le Tribunal a clairement condamné l’accaparement des terres, la déforestation et le changement d’affectation des sols, l’inondation massive de produits agrotoxiques, l’épuisement des ressources en eau, les incendies et la violence généralisée à l’encontre de la population, en grande mesure provoqués par le vol de bois, le modèle de production d’avocat, les serres de baies et l’agave.
Un an auparavant, la population, excédée par ces injustices et par la violence déclenchée par des groupes paramilitaires illégaux, a décidé de faire front. Cela n’a pas été facile mais la communauté, à commencer par les femmes, a organisé des barrages routiers autour de feux de camp (qui sont devenus des cuisines [fogones] allumées partout aux abords du village). Elle a assumé son autodétermination et s’est opposée à toute institution ou groupe qui remettait en question sa décision collective. Une garde communautaire a été mise en place et chargée de rendre des comptes à l’assemblée, qui est à son tour soumise aux décisions des assemblées de quartier. Cela a mené la communauté à fermer ses portes durant plusieurs années, jusqu’à parvenir à récupérer sa forêt et à établir l’horizontalité de son propre gouvernement, respectueux des femmes, des hommes, des enfants et des personnes âgées.
Dépassant l’exercice de formes horizontales de gouvernement, la communauté a proposé l’autonomie des municipalités et des communautés. Elle a pris des mesures difficiles mais essentielles pour que l’Institut national électoral reconnaisse l’élection des autorités par le biais des « us et coutumes » et en dehors du système des partis politiques. Son exemple s’est répandu, suivi par Angahuan et plusieurs autres communautés qui luttent contre l’agro-industrie, la corruption et le crime organisé[57].
Il ne fait aucun doute que cette lutte pour l’autonomie ne fait que commencer, enracinée dans ses traditions. Les cartels de l’accaparement s’acharnent à soumettre des régions entières, et les peuples suivent quant à eux l’exemple de Cherán et se déclarent autonomes pour se défendre.
Un modèle insoutenable
« Le travail de l’homme et de la nature, le produit des ceps, des arbres, doit être détruit pour que se maintiennent les cours, et c’est là une abomination qui dépasse toutes les autres. Des chargements d’oranges jetés n’importe où. Les gens viennent de loin pour en prendre, mais […] des hommes armés de lances d’arrosage aspergent de pétrole les tas d’oranges, et ces hommes sont furieux d’avoir à commettre ce crime et leur colère se tourne contre les gens qui sont venus pour ramasser les oranges. Un million d’affamés ont besoin de fruits, et on arrose de pétrole les montagnes dorées. »[58]
Stimulée par d’intenses campagnes de marketing qui vantent les qualités nutritionnelles de l’avocat, la consommation par habitant·e n’a cessé de croître dans les pays importateurs. Rien qu’aux États-Unis, elle a triplé en vingt ans[59]. L’avocat est vendu comme un « superaliment », dans une opacité complaisante quant à ce qui se passe réellement au niveau local, où il ne génère pas de bénéfices. Les réponses telles que les innovations technologiques permettant d’économiser de l’eau ou de ne pas déforester lors de la culture de cette plante – on a appelé ça la « déforestation zéro » – ne sont d’aucune utilité tant que la consommation mondiale continuera d’augmenter.
Nous sommes face à un modèle agro-industriel qui expose les petites et moyennes exploitations aux risques de leur activité et à subir toutes les externalités des dégâts qui ne cessent de s’accumuler. Les grandes sociétés de négoce et leurs investisseurs ne ressentent guère cette accumulation des effets sur la population ou la santé environnementale des territoires qu’ils épuisent.
Comme nous l’avons dit, ce ne sont pas les personnes qui cultivent l’avocat ni les organisations criminelles qui contrôlent le processus. L’intervention des différents acteurs sert toujours le système agroalimentaire industriel dans la destruction qu’il propage pour récolter les dividendes colossaux qu’il accumule. Il est donc important de comprendre la logique complexe de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
Face à ces réalités, il est impératif de redoubler d’efforts pour dénoncer l’agro-industrie et son modèle corrupteur et dévastateur, et que les populations s’organisent pour proposer des solutions à ce cauchemar.
Image en tête de page: Peinture murale à Cherán, retraçant la lutte menée par cette communauté. Ce « mural », situé dans la maison commune, s’inscrit dans une nouvelle vague d’art mural qui marqué toute la ville. De nombreuses rues ou bâtiments publics sont ainsi ornés d’œuvres collectives ou individuelles. Cette peinture murale est l’œuvre de Marco Hugo Guardián Lemus et de Giovanni Fabián Gutiérrez.
- Le texte original sur le lien
[1]John Steinbeck, Les raisins de la colère, Gallimard, 1947.
[2]Guillermina Ayala, « López: “Un Súper Bowl con guacamole” », Milenio, 11 février 2023, https://www.milenio.com/negocios/financial-times/exportaciones-de-toneladas-de-aguacate-para-la-final-de-la-nfl
[3]L’ACEUM est un accord de libre-échange entre le Mexique, les États-Unis et le Canada. Voir également Isabella González, « Una denuncia lleva a la producción mexicana de aguacate ante la comisión ambiental del T-MEC por ecocidio », El País, 8 février 2023, https://elpais.com/mexico/2023-02-08/una-denuncia-lleva-a-la-produccion-mexicana-de-aguacate-ante-la-comision-ambiental-del-t-mec-por-ecocidio.html
[4]Dans le reste du texte, les données concernant la production, les zones de culture et le commerce sont issues de FAOSTAT et de la base de données Comtrade des Nations Unies [Consulté le 25 janvier 2023]. La source pour les perspectives pour 2030 est la suivante : OCDE – FAO, « Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2021-2030 », 2021,
[5]Ruben Sommaruga, Honor May Eldridge, « Avocado Production: Water Footprint and Socio-economic Implications », EuroChoices, Vol. 20, Issue 2, Wiley Online Library, 13 décembre 2020, https://doi.org/10.1111/1746-692X.12289
[6]Voir : George Munene, « Chinese traders plan on increasing Kenyan avocado imports », Farmbiz Africa, 1er août 2022, https://farmbizafrica.com/market/3792-chinese-traders-plan-on-increasing-kenyan-avocado-imports ; Tanzania Invest, « Tanzania Sign 15 Strategic Agreements with China, Including Avocado Exports », 5 novembre 2022, https://www.tanzaniainvest.com/economy/trade/strategic-agreements-with-china-samia
[7]Département de l’agriculture des États-Unis (USDA), « 2022 Fresh avocado report », 14 novembre 2022, https://www.fas.usda.gov/data/china-2022-fresh-avocado-report
[8]Global AgInvesting, « US-based Mission Produce is developing its first domestic avocado farm in China », 8 juin 2018, https://www.farmlandgrab.org/post/view/28223-us-based-mission-produce-is-developing-its-first-domestic-avocado-farm-in-china
[9]Wageningen University, « Improved mango and avocado chain helps small farmers in Haiti », 2022, https://www.wur.nl/en/project/improved-mango-and-avocado-chain-helps-small-farmers-in-haiti-1.htm
[10]Voir : Grand View Research, « Avocado Market Size, Share & Trends Analysis Report By Form (Fresh, Processed), By Distribution Channel (B2B, B2C), By Region (North America, Europe, Asia Pacific, Central & South America, MEA), And Segment Forecasts, 2022 – 2030 », 2022, https://www.grandviewresearch.com/industry-analysis/fresh-avocado-market-report. Straits Research, « Fresh Avocado Market », 2022, https://straitsresearch.com/report/fresh-avocado-market
[11]Mission Produce, « Mission Produce Announces Fiscal 2021 Fourth Quarter Financial Results », 22 décembre 2021, https://investors.missionproduce.com/news-releases/news-release-details/mission-produce-announces-fiscal-2021-fourth-quarter-financial/
[12]Sources : Capital IQ, et la United States Securities and Exchange Commission, « Mission Produce. Form 10-K », 22 décembre 2022, https://investors.missionproduce.com/financial-information/sec-filings?items_per_page=10&page=
[13]Au Pérou, l’entreprise rapporte avoir depuis 2011 des plantations d’avocats dans trois fermes qui occupent 3 900 hectares et dit produire par ailleurs de la canneberge sur 400 hectares (serres y compris) dans le cadre d’une joint-venture, Moruga. Voir : Mission Produce, « Investor presentation », décembre 2022, https://investors.missionproduce.com/ ; United States Securities and Exchange Commission, « Mission Produce. Form 10-K », 22 décembre 2022, https://investors.missionproduce.com/financial-information/sec-filings?items_per_page=10&page=1; https://missionproduce.com/peru.
[14]Sources : https://ir.calavo.com/ ; Calavo Growers, « Calavo Growers, Inc. Announces Fourth Quarter and Fiscal 2021 Financial Results », 20 décembre 2021, https://ir.calavo.com/news-releases/news-release-details/calavo-growers-inc-announces-fourth-quarter-and-fiscal-2021
[15]Au Mexique, ses principales filiales sont Calavo de México et Avocados de Jalisco. Voir : Calavo Growers, « Investor presentation », 12 décembre 2022, https://ir.calavo.com/static-files/f4ee2e5a-0221-4b48-9b82-7aad7ca69ea7 ; United States Securities and Exchange Commission, « Calavo Growers, Inc. Form 10-K », décembre 2022, https://ir.calavo.com/static-files/9c13da31-3239-4843-8d91-6cff65c6bbf7
[16]Aux États-Unis, parmi ses principaux clients on trouve les groupes Kroger (15 % de la totalité de ses ventes en 2022), Trader Joe’s (11 %) et Wal-Mart (10 %). Source : Capital IQ. Voir également : « Calavo quiere exportar aguacate mexicano a Europa y Asia », El Financiero, 8 janvier 2021, https://www.elfinanciero.com.mx/opinion/de-jefes/calavo-quiere-exportar-aguacate-mexicano-a-europa-y-asia/
[17]Voir : IDC, « Westfalia grows an empire », 2018, https://www.idc.co.za/westfalia-grows-an-empire/ ; Société financière internationale (SFI), « Creating markets in Mozambique », juin 2021, https://www.ifc.org/wps/wcm/connect/a7accfa5-f36b-4e24-9999-63cffa96df4d/CPSD-Mozambique-v2.pdf?MOD=AJPERES&CVID=nMNH.3E; https://www.westfaliafruit.com/about-us/our-operations/westfalia-fruto-mocambique/ ; et « Agricom y Westfalia Fruit concretan asociación en Latinoamérica », Agraria.pe, 9 janvier 2018, https://agraria.pe/noticias/agricom-y-westfalia-fruit-concretan-asociacion-en-latinoamer-15664
[18]Marta del Moral Arroyo, « Prevemos crecer este año un 20% en nuestras exportaciones de palta a Asia y Estados Unidos », Fresh Plaza, 27 mai 2022, https://www.freshplaza.es/article/9431020/prevemos-crecer-este-ano-un-20-en-nuestras-exportaciones-de-palta-a-asia-y-estados-unidos/
[19]Voir : https://opencorporates.com/companies?jurisdiction_code=&q=westfalia+fruit&utf8=%E2%9C%93
[20]Par exemple, dans le cas de Calavo Growers, BlackRock contrôle 16 % de la société, Vanguard Group 8 %, et cinq autres fonds d’investissement en détiennent 20 %. Voir : Capital IQ, « Nuance Investments Increases Position in Calavo Growers (CVGW) », Nasdaq, 8 février 2023, https://www.nasdaq.com/articles/nuance-investments-increases-position-in-calavo-growers-cvgw ; « Vanguard Group Increases Position in Calavo Growers (CVGW) », Nasdaq, 9 février 2023, https://www.nasdaq.com/articles/vanguard-group-increases-position-in-calavo-growers-cvgw
[21]Liam O’Callaghan, « Mission announces South African expansion », Eurofruit, 8 février 2023, https://www.fruitnet.com/eurofruit/mission-announces-south-african-expansion/248273.article. Criterion Africa Partners réalise ses investissements avec entre autres, des apports de la Banque africaine de développement, de la Banque européenne d’investissement et de la société néerlandaise de financement du développement (FMO) (Source : Preqin).
[22]Harvard Management Company a ensuite cédé ses parts de Westfalia au fonds de capital-investissement Solum Partners. Voir : Lynda Kiernan, « HMC investment in Westfalia Fruit International to drive global expansion for avocados », Global AgInvesting, 17 janvier 2020, https://www.farmlandgrab.org/post/view/29422-hmc-investment-in-westfalia-fruit-international-to-drive-global-expansion-for-avocados ; et Michael McDonald, « Harvard spins off natural resources team, to remain partner », Bloomberg, 8 octobre 2020, https://www.farmlandgrab.org/post/view/29894-harvard-spins-off-natural-resources-team-to-remain-partner
[23]Voir : « Ontario Teachers’ acquires Australian Avocado Grower Jasper Farms », OTPP, 19 décembre 2017, https://www.farmlandgrab.org/post/view/27774-ontario-teachers-acquires-australian-avocado-grower-jasper-farms ; et « Canadian pension fund invests in ex-plantation privatizing Hawaii’s water », The Breach, 23 février 2022, https://www.farmlandgrab.org/post/view/30782-canadian-pension-fund-invests-in-ex-plantation-privatizing-hawaiis-water
[24]Voir : https://disclosures.ifc.org/enterprise-search-results-home/42280 ; https://disclosures.ifc.org/project-detail/SII/40091/westfalia-intl. Westfalia est une filiale de l’entreprise de production et de commercialisation de bois sud-africaine Hans Merensky Holdings (HMH), dont les principaux actionnaires sont Hans Merensky Foundation (40 %), IDC (30 %) et CFI (20 %) (voir : https://disclosures.ifc.org/project-detail/SII/42280/westfalia-moz-ii).
[25]Amanda Landon, « Domestication and significance of Persea americana, the avocado, in Mesoamerica », Nebraska Anthropologist, 47, 2009, https://digitalcommons.unl.edu/cgi/viewcontent.cgi?referer=https://en.wikipedia.org/&httpsredir=1&article=1046&context=nebanthro
[26]Ibid, p.70
[27]Jeff Miller, Avocado. A global history, The University of Chicago Press, 2020, https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/distributed/A/bo50552476.html
[28]Maria Popova, « A ghost of Evolution: The Curious Case of the Avocado, Which Should Be Extinct But Still Exists », The Marginalian, https://www.themarginalian.org/2013/12/04/avocado-ghosts-of-evolution/?mc_cid=ca28345b4d&mc_eid=469e833a4d qui cite Connie Barlow et son ouvrage The Ghosts of Evolution: Nonsensical Fruit, Missing Partners, and Other Ecological Anachronism https://books.google.com.mx/books/about/The_Ghosts_Of_Evolution.html?id=TnU4DgAAQBAJ&redir_esc=y
[29]Patricia Lazicki, Daniel Geisseler et Willliam R. Horwath, « Avocado production in California », UC Davis, 2016, https://apps1.cdfa.ca.gov/FertilizerResearch/docs/Avocado_Production_CA.pdf
[30]Flavia Echánove Huacuja, « Abriendo fronteras: el auge exportador del aguacate mexicano a Estados Unidos », Anales de Geografía de la Universidad Complutense, 2008, Vol. 28, n° 1, https://revistas.ucm.es/index.php/aguc/article/download/aguc0808110009a/30850.
[31]Calavo Growers, « Investor presentation », 12 décembre 2022, https://ir.calavo.com/static-files/f4ee2e5a-0221-4b48-9b82-7aad7ca69ea7
[32]Flavia Echánove Huacuja, op.cit. L’évolution de ces entreprises dans le secteur a été différente. Chiquita a abandonné le commerce d’avocats en 2012, alors que pour Del Monte, ce fruit représente de moins en moins de ventes, et chute à 8 % (320 millions de dollars) en 2021 (voir : https://seekingalpha.com/article/1489692-chiquita-brands-restructuring-for-value; et United States Securities and Exchange Commission, « Fresh Del Monte Produce Inc. Form 10-K », 2022, https://freshdelmonte.com/wp-content/uploads/2022/10/FDM_2021_SustainabilityReportFINAL.pdf).
[33]Source : SIAP ( http://infosiap.siap.gob.mx/gobmx/datosAbiertos_a.php) [Consulté le 27 novembre 2022]. À l’origine connu en tant qu’État de México, le nom de cet état fédéral mexicain a tellement prêté à confusion qu’on a fini par le désigner par son acronyme, Edomex.
[34]María Adelina Toribio Morales, César Adrián Ramírez Miranda et Miriam Aidé Núñez Vera, « Expansión del agronegocio aguacatero sobre los territorios campesinos en Michoacán », México, Eutopía, Revista de Desarrollo Económico Territorial, n° 16, décembre 2019, pp. 51-72, https://revistas.flacsoandes.edu.ec/eutopia/article/download/4117/3311?inline=1
[35]Enrique Espinosa Gasca affirme : « Le ministère de l’Environnement, des Ressources naturelles et du Changement climatique du Michoacán (Semadet de par ses sigles en espagnol) a reconnu en mars 2019 qu’au cours des 20 dernières années, depuis 2000, le Michoacán avait perdu un million d’hectares de couvert forestier, d’une part en raison de l’exploitation forestière illégale, et d’autre part à cause d’incendies de forêt provoqués volontairement pour modifier l’affectation des sols », « Berries, frutos rojos, puntos rojos », Colectivo por la Autonomía, GRAIN (eds.), Invernaderos: Controvertido modelo de agroexportación, Ceccam, 2021.
[36]Gouvernement du Mexique, SIACON. (2020). Agrícola Estatal. México: Sistema de Información Agroalimentaria y Pesquera (SIAP) https://www.gob.mx/siap/documentos/siacon-ng-161430, http://infosiap.siap.gob.mx/gobmx/datosAbiertos_a.php
[37]« Se triplica cosecha de agave, berries y aguacate en Jalisco », El Informador, 23 décembre 2021, https://www.informador.mx/Se-triplica-cosecha-de-agave-berries-y-aguacate-en-Jalisco-l202112230001.html
[38]María Ramírez Blanco, « Agave, berries y aguacate encarece precio de la tierra en Jalisco, roba terreno al maíz y al ganado », UDG TV, 31 janvier 2023, https://udgtv.com/noticias/agave-berries-aguacate-encarece-precio-tierra-jalisco-roba-maiz/
[39]Agustín del Castillo, Territorio Reportaje n° 8, « Negocio, ecocidio y crimen », Canal 44tv, Université de Guadalajara, octobre 2022, https://youtu.be/WfH3M22rrK8
[40]Agustín del Castillo, Territorio Reportaje n° 7 « La huella criminal en el fruto más valioso del mundo: la palta, el avocado, el aguacate », Canal 44tv, Université de Guadalajara, septembre 2022, https://www.youtube.com/watch?v=GSz8xihdsTI
[41]Ministère de l’Agriculture et du Développement rural du Mexique, « Productores de pequeña escala, los principales exportadores de aguacate a Estados Unidos: Agricultura », 29 janvier 2020, https://www.gob.mx/agricultura/prensa/productores-de-pequena-escala-los-principales-exportadores-de-aguacate-a-estados-unidos-agricultura
[42]Nous coïncidons, dans nos résultats et notre argumentation, avec la publication Violence takes place series, Land, Markets and Power in Rural Mexico, de Noria Research, éditée par Jayson Maurice Porter et co-éditée par Alexander Aviña. Le chapitre 4, « Violencia y capitalismo aguacatero en Michoacán », d’Alexander Curry, se montre sceptique à l’égard des analyses où la violence peut être comprise à partir de ses résultats, comme « le contrôle d’un territoire, d’une route obtenus par la coercition » par exemple. « Ces analyses oublient que la violence fait partie intégrante d’un processus social, qu’elle est dotée d’un cadre temporel propre » et qu’il faut intégrer le processus dans un champ plus large de relations d’inégalité de toutes sortes, où le paradoxe est que les acteurs légaux et illégaux s’entremêlent aux niveaux local, national et international, mais dans des sphères qui ne se touchent que rarement. Le négoce de l’avocat ne s’explique pas par les cartels, mais par l’enchevêtrement que représente le capitalisme international.
[43]Voir : https://www.netafim.com.mx/cultivos/aguacate/ et https://es.rivulis.com/crop/aguacates/#
[44]Jennifer Kite-Powell, « Using Drip Irrigation To Make New Sustainable Growing Regions For Avocados », Forbes, 29 mars 2022, https://www.forbes.com/sites/jenniferhicks/2022/03/29/using-drip-irrigation-to-make-new-sustainable-growing-regions-for-avocados/
[45]Voir : Pat Mooney, « La insostenible Agricultura 4.0. Digitalización y poder corporativo en la cadena alimentaria », ETC Group, 2019, https://www.etcgroup.org/sites/www.etcgroup.org/files/files/la_insostenible_agricultura_4.0_web26oct.pdf.
Voir également : Colectivo por la Autonomía, GRAIN (eds), Invernaderos: controvertido modelo de agroexportación, op.cit.
[46]Colectivo por la Autonomía, Evangelina Robles, José Godoy et Eduardo Villalpando, « Nocividad del metabolismo agroindustrial en el Occidente de México », Eduardo Enrique Aguilar, coord. Agroecología y organización social. Estudios críticos sobre prácticas y saberes, Université de Monterrey, Editorial Ítaca, 2022. https://www.researchgate.net/publication/365173284_Agroecologia_y_organizacion_social_Estudios_criticos_sobre_practicas_y_saberes
[47]Metapolítica, « La guerra por el Aguacate: deforestación y contaminación imparables », BiodiversidadLA, 24 juin 2019, https://www.biodiversidadla.org/Noticias/La-guerra-por-el-Aguacate-deforestacion-y-contaminacion-imparables
[48]Chloe Sutcliffe et Tim Hess, « The global avocado crisis and resilience in the UK’s fresh fruit and vegetable supply system », Global Food Security, 19 juin 2017, https://www.foodsecurity.ac.uk/blog/global-avocado-crisis-resilience-uks-fresh-fruit-vegetable-supply-system/
[49]Nathanael Johnson, « Are avocados toast? California farmers bet on what we’ll be eating in 2050 », The Guardian, 30 mai 2016, https://www.theguardian.com/environment/2018/may/30/avocado-california-climate-change-affecting-crops-2050
[50]GRAIN, « Les cultures irriguées responsables de l’assèchement des puits », 21 février 2023, https://grain.org/fr/article/6960-les-cultures-irriguees-responsables-de-l-assechement-des-puits
[51]Danwatch, « Paltas y agua robada », 2017, http://old.danwatch.dk/wp-content/uploads/2017/05/Paltas-y-agua-robada.pdf
[52]Fresh Fruit Portal, « Steve Barnard, Founder and CEO of Mission Produce: We now import more to Chile than we export », 23 août 2021, https://www.freshfruitportal.com/news/2021/08/23/steve-barnard-founder-and-ceo-of-mission-produce-we-now-import-more-to-chile-than-we-export/
[53]Les zones de sacrifice sont des « lieux de grave pollution et de dégradation de l’environnement, où la priorité a été donnée aux profits économiques plutôt qu’aux personnes, entraînant de la sorte des abus ou des violations des droits humains » (Elizabeth Bravo, « Zonas de sacrificio y violación de derechos », Naturaleza con Derechos, Boletín 26, 1er septembre 2021, https://www.naturalezaconderechos.org/2021/09/01/boletin-26-zonas-de-sacrificio-y-violacion-de-derechos/)
[54]Voir : Catalina Wallace, « La obra de ingeniería que cambió el desierto peruano », Visión, mars 2022, https://www.visionfruticola.com/2022/03/la-obra-de-ingenieria-que-cambio-el-desierto-peruano/ ; et « Proyecto de irrigación Olmos », Landmatrix, 2012, https://landmatrix.org/media/uploads/embajadadelperucloficinacomercialimagesstoriesproyectoirrigacionolmos2012pdf.pdf. Ce projet coûteux faisait partie de l’affaire de corruption Odebrecht dans le cadre de l’opération « Lava Jato » (Jacqueline Fowks, « El ‘caso Odebrecht’ acorrala a cuatro expresidentes peruanos », El País, 17 avril 2019, https://elpais.com/internacional/2019/04/16/america/1555435510_660612.html)
[55]Liga contra el Silencio, « Los aguacates de AngloGold dividen a Cajamarca », 30 octobre 2020, https://www.biodiversidadla.org/Documentos/Los-aguacates-de-AngloGold-dividen-a-Cajamarca
[56]« Colombia: Los aguacates de AngloGold dividen a Cajamarca », La Cola de Rata,16 octobre 2020, https://www.farmlandgrab.org/post/view/29921-colombia-los-aguacates-de-anglogold-dividen-a-cajamarca
[57]Voir : Las luchas de Cherán desde la memoria de los jóvenes (Cherán Ireteri Juramukua, Cherán K’eri, 2021) ; Daniela Tico Straffon et Edgars Martínez Navarrete, Las raíces del despojo, Conaculta, 2022, https://www.u-topicas.com/libro/las-raices-del-despojo_15988 ; Mark Stevenson, « Mexican town protects forest from avocado growers and drug cartels », Los Angeles Times, https://www.latimes.com/world-nation/story/2022-01-31/mexican-town-protects-forest-from-avocado-growers-cartels ; Monica Pellicia, « Indigenous agroforestry dying of thirst amid a sea of avocados in México », https://news.mongabay.com/2022/06/indigenous-agroforestry-dying-of-thirst-amid-a-sea-of-avocados-in-mexico/
[58]Les raisins de la colère, op.cit.
[59]Département de l’Agriculture des États-Unis, « Imports play dominant role as U.S. demand for avocados climbs », 2 mai 2022, https://www.ers.usda.gov/data-products/chart-gallery/gallery/chart-detail/?chartId=103810